Star Wars – Ahsoka : La critique de la saison 1
STAR WARS – AHSOKA
Plateforme de diffusion : Disney+
Créateurs : Dave Filoni
Scénaristes : Dave Filoni
Musique : Kevin Kiren
Interprètes : Rosario Dawson ; Natasha Liu Bordizzo ; Mary Elizabeth Bordizzo ; Ray Stevenson ; Ivanna Sakhno ; Diana Lee Inosanto ; David Tennant
LA CRITIQUE
Il est temps de revenir sur cette première saison – et unique ? – d’Ahsoka. Attendu par beaucoup comme la confirmation que Dave Filoni pouvait faire basculer l’Univers Star Wars 2.0, aux grandes oreilles, dans les standards qu’on est en droit d’attendre du leader mondial de la production cinématographique.
Parce qu’ici, tous les feux étaient aux vert : ce bon vieux Dave à la réalisation et en tant que Showrunner, du budget et un personnage emblématique connu et aimé de tous les adorateurs de SW. Ahsoka a-t-elle tenue son rang ?
Ambition retrouvée
Débutons par l’évidence, avec Ahsoka on a retrouvé Star Wars. Tant par l’ambition des décors, des costumes et des effets spéciaux, Disney a mis les petits plats dans les grands pour le bonheur des mirettes de tous. Mais au-delà de l’argent visible à l’écran, il s’agit des choix de direction artistique qu’il faut saluer.
Le show demeure crédible dans sa timeline, devant se dérouler dans la continuité de l’Episode VI et faire le liant avec Le Réveil de la Force. Avec une pointe de fan service lorsque cela est utile, les maquillages, droïdes et autres clins-d ’œil à l’univers original amenant immédiatement à identifier visuellement l’Univers présent ici.
D’ailleurs, parce qu’il faut le souligner, une fois arrivé sur Peridea, on constate tout le soin apporté au vaisseau survivant et à l’évolution esthétique des armures, uniformes et personnages. C’est là qu’on se rend compte de la profondeur de l’univers développé.
Développements inégaux
Le principal atout de ce show réside tout de même dans son personnage principal. Ahsoka Tano, enfant chérie du créateur de The Clone Wars et Rebels, avait enfin l’opportunité de se révéler au grand public. Même si les shows précédents lui ont fait la part belle, il fallait tout de même confirmer la place du personnage le plus important, hors long métrage.
Si le but était de la mettre en valeur, dans une position de sage, sûre de sa puissance et confiante dans la destinée et la Force, c’est totalement réussi. Véritable ange-gardien de Sabine, ayant la foi envers et contre-tout, impériale au combat, l’ex-apprentie d’Anakin – avec qui elle se confronte métaphoriquement – semble être celle qui maintient le côté clair de la Force, bien plus que Luke Skywalker et tant pis pour les Legends !
Mais si l’héroïne principale connait un traitement digne de son aura, ce n’est pas le cas avec toutes les caractérisations durant cette saison et bien plus subtilement qu’il n’y parait. La grand majorité des suiveurs ont loué le regretté Ray Stevenson et son interprétation sublime de Baylan, ancien Jedi, d’un réalisme nihiliste froid.
Mais si on analyse la trajectoire de son personnage, passé son combat contre Lady Tano, il n’a plus d’évolution et n’apporte plus rien. Il s’efface face à Thrawn et on ignore tout de son but, alors que son histoire, au milieu de ce lieu mystique, ne pouvait être que passionnante.
En parlant du Grand Amiral, son interprétation est au poil et son traitement est parfaitement dans la lignée de Rebels. Alors que celui de Shin Hati, pourtant intrigante au demeurant, fini en queue de poisson. Et que dire de Sabine et Ezra, grandement chahutés par la communauté de fans, qui pourtant ont une progression narrative dans laquelle ils évoluent, progressent et atteignent leurs buts.
Il existe donc un travail inégal sur l’aboutissement des personnages, peut-être par manque de temps, mais nous y reviendrons plus bas. Malgré cela l’intégralité du casting est tout de même remarquable dans son jeu.
Divine photographie et réalisation dantesque
Mettons en avant le travail de Quyen Tran. Directrice de la photographie ayant travaillé dans toute autre chose que des univers de Science-Fiction, c’est peut-être là d’ailleurs son principal atout. Elle a permis à cette création de prendre son envol en termes d’images.
Un travail particulièrement sublimé dans la quatrième partie, Jedi Déchu, où l’on comprend toute la symbolique dans l’esthétisme qui transparait à l’écran. Une logique dans le choix de la colorimétrie : claire dans la Galaxie connue, sombre dans le Monde entre les Mondes et sur Peridea, monochromatique en nuance de gris cassée par la végétation rouge et la brillance des sabres lasers dans l’épisode de transition entre ces deux galaxies.
Épisode après épisode, le travail sur la lumière viens sublimer une réalisation au diapason. Si on doit reconnaître une vraie avancée entre cette série et les films de la postlogie, à l’opposé du brouillon et de la surenchère que nous avons connue, tout ici est pensé et réfléchis avec une utilisation brillante du StageCraft.
La technologie faite à base d’écran géant, créée pour The Mandalorian, permets durant cette saison d’ouvrir les lignes d’horizon. Fini la claustrophobie de Boba et Obi Wan, place au grand décor et à des mises à l’échelle impressionnantes. Du vaisseau de Thrawn, au gigantisme de la mythologie des sœurs de la nuit, en passant par les baleines spatiales, tout est fait, et bien fait, pour nous faire ressentir le gigantisme de l’Espace, alors que les voyages dans l’hyperespace nous avaient habitués à des transports quasi instantanés.
Pour conclure sur cette partie, le choix de rétablir des combats au sabre, évoquant Kurosawa et les grands duels épiques de la trilogie originale, est particulièrement bien pensé. D’autant que le grand duel final entre Ahsoka et Elsbeth, s’emballant dans la chorégraphie, permet de comprendre la grandeur de l’affrontement.
Fantastique plus que SF
Ahsoka marque surtout un tournant dans le style. Star Wars, c’est du space-opera à la sauce science-fiction. Mais dans cette série c’est de moins en moins le cas. L’exemple le plus marquant réside dans ce fameux voyage intergalactique. Là où les Impériaux galèrent à construire un vaisseau assez puissant pour rejoindre le grand amiral, il suffit d’une communication télépathique avec des êtres magiques à Ahsoka pour en faire de même.
Bien évidemment, les sœurs de la nuit, qui empruntaient déjà au magique dans les séries animées de Filoni, ajoute encore plus à cette lecture. Pas d’explication rationnelle, très peu de lore présenté, elles ont des pouvoirs et elles sont puissantes, point.
Même chose pour Sabine. Elle n’a aucune sensibilité avec la force, qui selon George Lucas dépend des Midi-chloriens faut-il le rappeler, mais, quand le scénario l’exige, arrive à un exploit en projetant Ezra dans le vaisseau. Un côté « Fermez-là, c’est magique » bien trop présent pour ne pas agacer lorsque l’on regarde la série dans sa globalité. Sans parler du retour des Stormtroopers zombies qui ont dû faire bondir plus d’un…
Enfin, notre héroïne principale semble tel un Perceval dans les Légendes arthuriennes : habitée d’une destinée. Quoi qu’il arrive, quoi qu’elle fasse, tout tournera toujours en sa faveur. Au-delà d’une logique presque divine, on comprend bien que le but ici est de l’instaurer comme un élément central de l’univers et que le scénario ira toujours dans ce sens. Mais plutôt que de le faire finement, la série nous l’impose bon gré mal gré.
Le piège du huit
Peut-être tout simplement que toutes les problématiques relevées plus haut dans cet article, sont inhérentes au format des séries Disney. Ces fameux huit épisodes auxquels le studio semble attachés tant pour des raisons de budget que de calendrier de sortie.
On comprend bien qu’ici que Dave Filoni a une volonté de traiter son sujet comme plusieurs longs métrages. Mais surtout, on sent que quatre épisodes de plus n’auraient pas été de trop. Que ce soit pour la disparition des deux Jedis aux sabres rouges lors de l’épilogue, ce qui entoure les Sœurs de la nuit, le plan final de Thrawn, tout semble rusher pour tenir dans ce format.
Malgré le côté exaltant de la conclusion, avec beaucoup d’action, des retournements de situations et du suspense, on n’en reste pas moins sur notre faim tant les paraissent immenses.
Standard Marvel
Mais là où le créateur de The Clone Wars et Rebels s’est quelque peu tiré une balle dans le pied, c’est avec le manque considérable d’explications scénaristiques. Disons-le simplement, il faut avoir vu l’intégralité des programmes des séries animées et live-action, en plus des films bien évidemment, pour comprendre l’ensemble des enjeux de cette première saison.
À croire que la firme américaine utilise la recette boulimique de Marvel sur Star Wars. Avec cette logique mercantile ignoble : obliger le spectateur à TOUT regarder. Ce qui a comme conséquences négatives, d’une, exclure quasiment automatiquement tous les nouveaux spectateurs qui n’ont pas les références et de deux, faire de SW la nouvelle vache à lait de Mickey et sa bande.
Bien évidemment que George Lucas n’était pas un mécène, mais on sent ici la commercialisation de manière un peu trop prégnante qui peut rebuter pour les prochaines œuvres à venir.
La Meilleure série ?
Objectivement, si l’on fait un récapitulatif de ces dernières années, dans le cadre Star Wars classique, ce qui exclut Andor de fait, Ahsoka et la meilleure production à ce jour. Mieux abouti visuellement, mieux jouée, mieux réalisée, la série de Dave Filoni installe un nouveau standard au-delà de The Mandalorian.
Mais peut-être que Disney gagnerait à prendre son temps et accepter de casser un petit peu son modèle pour développer au mieux ce type d’univers. La répétition des créations médiocres amène mécaniquement à une plus grande impatience de la part des fans. On peut être déçu par Ahsoka alors qu’avec du recul c’est un show solide, qui ramène aux adorateurs de l’univers quelques lettres de noblesse.
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