Star Trek Discovery : Review 3.07 Unification III

Date : 30 / 11 / 2020 à 17h00
Sources :

Unification


Fournir une analyse critique d’une suite aux épisodes mythiques de Star Trek La nouvelle génération, alors même que ce sont ces deux épisodes qui ont donné son nom à l’association 1901 dont est issu notre site, n’est pas une chose facile. D’autant plus que, une fois n’est pas coutume, j’ai été largement spoilé avant visionnage des grands éléments qui composent cet épisode. Donné comme ça, les informations brutes ne laissaient pas présager d’un chef d’oeuvre...

Et, comme souvent avec Discovery, il y a à boire et à manger, bref du caviar et de la mal bouffe. Et si je prend, selon moi ce qui marche le plus, c’est pour une fois ce qui touche intimement Michael Burnham.

Alors, d’accord, cela commençait plutôt mal avec le retour miraculeux et surprise de Maman Burnham en Qowat Milat avec une mise en scène digne au choix de Mask Singer pour la révélation ou d’une sitcom AB production de la grande époque pour la crédibilité. C’est juste d’un ridicule à pleurer.

Mais une fois ce moment passé, beaucoup plus intéressante est la suite. Cela passe par une forme de procès de Michael Burham. D’abord avec Book, qui pointe en regardant sa douce avec tendresse qu’elle a le complexe du Messie, "merci chéri". Ensuite par sa propre mère qui en 2 minutes énumère par le menu tout ce qui ne va pas chez elle. Et Maman Qowat n’y va pas à la légère, elle sulfate exactement tout ce qu’on reproche à son personnage. Si je pense qu’Yves va pointer une forme de manipulation des scénaristes pour relégitimer in fine Wonder Burnham, ce en quoi je suis assez d’accord, il faut quand même noter à quel point, tout au long de cet épisode, la super-héroïne prend cher. Et c’est assez jouissif.

Sur la destinée de Vulcain, débaptisée suite à la reunification achevée entre vulcains et romuliens, je ne suis pas négatif, juste un peu dubitatif. Si les raisons du divorce avec la Fédération me semble assez bien amené, j’ai un peu plus de mal avec les différences encore saignantes entre les deux peuples. Quelques dizaines d’années après l’Unification, je veux bien que les tensions soient encore présentes. Mais 800 ans après la destruction de Romulus, que les choses soient encore aussi tranchés, je n’y crois pas un seul instant.

Reste ce qui va beaucoup faire parler, la nomination de Tilly comme nouveau Numéro 1 du Discovery. Sachant que je ne déteste pas du tout le personnage, même si je me sens souvent seul sur ce coup là, on ne peut pas dire que la décision de Saru coule de source. Nommer Numéro 1 la personne la plus instable émotionnellement, donc à priori incapable de prendre une décision dans un moment de grande tension est logiquement un acte suicidaire de la part de Saru.

Mais, on sait tous que ce n’est absolument pas grave. Parce que dans les faits, à partir du moment où Lorca a disparu pour de bon, le vrai Capitaine du vaisseau a toujours été en toute circonstance Michael Burnham. Quand on devine tout avant tout le monde, quand on a raison sur tout, tout le temps, quand on se met en action toujours sans attendre d’en avoir reçu l’ordre, c’est elle qui dans les faits dirige le vaisseau. Et je vous donne ma main à couper qu’à chaque fois où Saru et Tilly seront dans le caca, Wonder Burham sera présente pour sauver le moment.

En montrant avec autant d’acuité les tares du personnage principal de la série, Unification III est en fait la preuve que Michelle Paradise et Alex Kurtzman ont totalement conscience de ce qu’ils font, c’est à dire donner un Star Trek dont les tenants et aboutissants sont à l’opposé de ce qui a été construit auparavant. L’épisode montre en filigrane, à l’opposé de son nom, les raisons du séparatisme entre fans qui s’exprime chaque semaine sous cet article. On peut donc s’en offusquer, analyser Discovery et la comparer avec acuité avec le passé comme le fait magistralement Yves. On peut aussi lâcher prise, voir et apprécier ou pas la série pour ce qu’elle est et pas pour ce qu’elle devrait être.

FM

Le second épisode anniversaire de la série Stargate SG-1, à savoir 10x06 200, fut un festival "méta" sur l’art et la manière de composer des épisodes de SF, mais aussi sur les différentes recettes éprouvées pour manipuler le public. Au nombre d’entre elles, il y avait la "lantern" consistant pour les showrunners à entériner dans leurs scripts les faiblesses dont ils ont eux-mêmes conscience mais également les diverses doléances exprimées par les fans. Ces "lanterns" sont donc essentiellement des paratonnerres destinés à témoigner de la lucidité des auteurs, à prévenir de nouvelles critiques, et à offrir au spectateur un sentiment de gratification (l’impression d’avoir été entendus et la jouissance de voir les plus exaspérants défauts étrillés en in-universe). Pour autant, loin de constituer un quelconque examen de conscience assorti d’une correction de cap, ce procédé a surtout la vocation d’être un passeport d’impunité envers l’audience pour persévérer dans la même voie. Faute avouée à moitié pardonnée selon l’adage, et les travers de la série pourront ainsi se transformer en connivences aux yeux d’un public qui sera dès lors mieux disposé à s’en accommoder, voire à "jouer" avec. En somme, des alibis en forme de trompe-l’œil, fatalement affectionnés par d’authentiques prestidigitateurs.
Cette forme de con art, Alex Kurtzman et ses associés en ont fait aujourd’hui un véritable système… depuis la version bêta au début de ST Into Darkness où Baby-Kirk était renvoyé sur les bancs de Starfleet Academy le temps d’une ligne de dialogue, afin de satisfaire les nombreux spectateurs qui s’étaient plaints en 2009 du manque de crédibilité d’une promotion direct de cadet à… capitaine du vaisseau amiral de Starfleet. Mais bien entendu, cet apparent "amendement scénaristique" dans le second opus fut illusoire, puisqu’il suffisait d’attendre quelques minutes pour que le sacre de Baby-Kirk soit en fait confirmé à la faveur d’une attaque terroriste. Ainsi, l’astuce permettait aux auteurs d’avoir le beurre et l’argent du beurre, c’est-à-dire de toujours vendre la même facticité tout en apaisant les éventuels mécontents.
Quelque onze ans après, avec une expérience en manipulation accrue, cela donne le mal nommé DIS 03x07 Unification III.

Par son seul titre, l’épisode accuse une prétention surréaliste… à vouloir compléter le mythique diptyque ST TNG 05x07+05x08 Unification… qui pourtant n’appelait en lui-même aucune conclusion directe (ni indirecte d’ailleurs) étant donné la finesse de son parti pris, se refusant à tout artifice résolutif, les grands problèmes de société se déployant seulement sur le temps long.
Jusqu’en 2005, Star Trek avait composé un worldbuilding tout à fait unique par sa cohérence profonde sur plusieurs siècles de timeframe, chaque série venant crédibiliser les précédentes et consolider le Trekverse (alias STU). De nombreux arcs thématiques en suspens auront été ainsi achevés, la plupart des énigmes voire des incohérences furent mêmes résolues. Cependant, jamais, y compris dans la très internaliste Enterprise, un auteur historique n’avait eu le culot de reprendre in texto un titre d’épisode antérieur pour l’incrémenter.
Mais les showrunners de Discovery osent tout, et c’est même à ça qu’on les reconnait. Autant dire qu’avec ce parti pris, ils placent eux-mêmes la barre très haut, et c’est donc à l’aune de leur prétention qu’ils seront jugés.

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Après celles de l’USS Yelchin et de l’USS Gav’nor (à une distance de 1000 AL du premier), la boîte noire de l’USS Giacconi dévoile une explosion décalée de 7 millionièmes de secondes. Sans même revenir sur le caractère scientifiquement bancal de la corrélation entre la non-simultanéité de tous les Burns et l’existence d’un point d’origine (cf. la critique précédente), faut-il que Burnham – pourtant diplômée de l’académie des sciences de Vulcain et officier scientifique en chef de l’USS Discovery – ignore les mathématiques les plus élémentaires pour affirmer qu’il est possible de trianguler la source du Burn (Brasier) dans l’espace avec seulement trois (coor)données ? Dans un plan en 2D certes, mais sans valeur de preuve (faute de quatrième référent de confirmation). En revanche, dans l’espace en 3D, qui plus est non vectoriel, aucune localisation n’est possible à ce stade, alors ne parlons pas de preuve…
Les auteurs en auront suffisamment conscience pour placer une objection dans la bouche de Tilly (manque d’information pour une quelconque triangulation dans un espace en trois dimensions). C’est la première "lantern"… mais loin d’être la dernière.
Donc, bien évidemment, la narration n’en tiendra ensuite nullement compte, puisque dans tout l’épisode, Mary-Sue s’obstinera à mettre la charrue avant les bœufs, en clamant qu’elle détient désormais des "preuves". "Preuve" de l’existence d’un point d’origine au Burn, et certitude sur l’endroit d’où il ne vient pas (Vulcain) à défaut d’avoir déterminé l’endroit exact d’où il provient. Et cette assertion convaincra suffisamment l’amiral Vance pour qu’il fasse d’elle l’émissaire officielle de la Fédération… auprès de Ni’var… au grand dam de Saru qui venait de la sanctionner avec fatuité.

Ni’Var, quid ? Eh bien c’est le nouveau nom de la planète Vulcain… après la réunification avec les Romuliens survenue il y a plusieurs siècles suite au processus initié par Spock en 2368 dans ST TNG 05x08 Unification II, mais se traduisant par une cohabitation délicate entre eux.
Étant donné la place cardinale de la planète Vulcain dans le mythe trekkien, cette initiative de Discovery est certainement la plus ambitieuse de cette saison 3 pour figurer le passage des 930 ans, tentant ainsi probablement de compenser par la sociologie son manque d’imagination technologique. Ce parti pris semble également respecter le temps long qui, seul, préside aux évolutions sociologiques crédibles... comme le suggérait si bien le célèbre diptyque de ST TNG.
Malheureusement, cette nouvelle tentative de worldbuilding est assez illusoire voire viciée à la base, du moins en tant qu’accomplissement historique majeur. Parce que si l’épisode tente de rendre justice à l’œuvre de Spock pour justifier sa dénomination pompeuse, il force pour cela le trait à la façon d’un micro-univers de bac-à-sable (en imputant à un VIP unique et iconique – connu même des non-trekkers – une évolution sociétale complexe étalée sur des siècles), tout en se gardant bien d’évoquer la cause principale, à savoir la destruction de Romulus (et l’extermination de sa population) par la supernova cartoonesque de ST 2009 assortie de l’impéritie de l’UFP dans la série Picard. Pourtant, c’est bien davantage à la disparition de l’Empire romulien et à la réduction considérable de sa population – ramenée à l’état de diaspora galactique et de réfugiés – que l’on peut imputer cette réunification… qui n’aurait certainement pas été possible, du moins pas de cette manière ni sous cette forme, si l’Empire romulien avait survécu intact.
Puisque cette saison 3 de Discovery tient tant à assumer ostensiblement l’héritage de Kelvin et de Picard, c’est l’œuvre même de Spock qui est dès lors vidée de sa substance, car autant elle aurait représenté un exploit sociétal si elle avait conduit à un rapprochement de Vulcain et de l’Empire romulien au sein de l’UFP, autant elle ne représente pas grand-chose lorsqu’il ne reste qu’une poignée de Romuliens déshérités, errant l’âme en peine à travers la galaxie.
Comprenons-nous bien : ce n’est pas en soi l’icônisation de Spock par la postérité qui est forcément invraisemblable (certains initiateurs de projets traumatiques d’envergure peuvent rétrospectivement devenir des vecteurs de rassemblement voire des symboles politiques), mais c’est l’ignorance pure et simple de son volet romulien pourtant bien antérieur (remontant au minimum au 22ème siècle et à V’Las dans ST ENT 04x09 Kir’Shara).
En outre, la dilution et la réduction de spectre de "l’Unification" font injure à l’ambition et à la portée du titre et donc au sens de cet épisode. Telle une parodie insultante du sacerdoce de Spock : la réunification pour laquelle il s’est tant battu s’est concrétisée après sa mort, mais seulement parce que presque tous les Romuliens ont été exterminés. En gros, l’union s’est surtout faite dans les cimetières ! Une "réussite" ça ?! Non, un camouflet envers les idéaux et les auteurs de ST TNG 05x07+05x08 Unification... mais aussi de la superbe trilogie vulcaine de la saison 4 de ST ENT.
Raison de plus alors pour que les tensions internes à Ni’Var des siècles (et non pas des décennies) après cette "réunification au rabais" paraissent capillotractées. Et où sont les inéluctables hybridations (ou métissages) entre Vulcains et Romuliens pour une union civilisationnelle de presque 700 ans (soit quasiment 28 générations) ? Autant de carences en worldbuilding qui feraient croire que la troisième saison de DIS prend place au mieux quelques décennies après la série Picard !
Certes, la nouvelle dénomination de la planète semble avoir été choisie à bon escient, pour faire honneur à l’Histoire "secrète" de la franchise. Ni’Var était en effet le nom d’un vaisseau Vulcain au 22ème siècle dans ST ENT 01x15 Shadows Of P’Jem... qui rendait lui-même hommage à l’une des premières nouvelles Star Trek de l’univers étendu, écrite par la linguiste Dorothy Jones, publiée en 1967 dans la fanzine T-Negative, et où le Ni Var désignait un art vulcain consistant à examiner n’importe quel sujet à travers deux perspectives pour en révéler la dualité. Néanmoins, si dans ST ENT Ni’Var suggérait subtilement (et à juste titre) le double visage des Vulcains d’alors (l’enseignement de Surak vs. l’influence romulienne), cela renvoie dans DIS à la désormais double identité de la planète Vulcain depuis la réunification. Or aussi poétique que soit cette idée, elle est philosophiquement antinomique de la vocation même d’une réunification – visant à restaurer l’unité d’une peuple et non cristalliser à jamais l’état transitoire d’une bicéphalie.
Par ailleurs, l’adoption d’un système présidentiel – alors que celui-ci ne faisait partie ni de la culture vulcaine ni de la culture romulienne – suggère une empreinte anthropocentriste, à moins qu’il ne faille y voire une tentative de transposition à contremploi. La société vulcaine-romulienne réunifiée semble en effet réduite à l’utilitarisme de figurer les défis du multi-communautarisme dans les sociétés occidentales, et en particulier aux USA. Ce qui est tout naturel puisque le ST Kurtzmanien n’est désormais plus qu’un manifeste politique indexé sur les enjeux électoraux de l’US Democratic Party.

Le Burn a conduit Ni’Var a quitter l’UFP, paradoxalement moins par la volonté des Romuliens que des Vulcains, ces derniers estimant que l’UFP leur avaient forcé la main en les faisant expérimenter le projet SB-19 qui selon eux avaient provoqué le Burn.
Le dilithium venant à manquer du fait de l’expansion croissante de la Fédération au cours des 30ème et 31ème siècles, celle-ci a incité ses membres à développer des technologies de FTL alternatives. Le SB-19 fut la solution proposée par Ni’Var. Il s’agissait d’un mode de déplacement aussi efficace que le spore drive (pouvoir se rendre instantanément n’importe où sans dilithium), mais il fut considéré comme risqué. Après le Burn et la sécession de Ni’Var, cette dernière a classifié toutes les données relatives au SB-19, ne permettant plus à l’UFP d’y accéder.
Or dans la mesure où ces informations seraient utiles à l’investigation menée par Michael sur l’origine réelle du Brasier, l’enjeu serait d’en négocier l’accès auprès de Ni’Var. Vance a alors l’idée d’exploiter les liens entre Burnham et le légendaire Spock pour rétablir un lien diplomatique…
La décision est donc prise, et l’amiral envoie à Ni’Var un rapport intitulé : "Michael Burnham is coming" ! Tout est dit par cette seule phrase… en terme à la fois de vanité Burnham-centrée et d’incohérence internaliste.
Car pour mémoire, dans l’épilogue de DIS 02x14 Such Sweet Sorrow Part 2, Spock et Pike avaient pris le parti – aussi infondé et absurde qu’il soit – d’effacer rétroactivement toute trace historique de l’existence même de Michael Burnham… afin "d’expliquer" qu’il n’en soit jamais fait mention dans le ST historique. Or comme l’existence du spore drive a bel et bien été effacé des archives, il en a probablement été de même pour Mary-Sue. Ce qui invaliderait grossièrement ce "Michael Burnham is coming".
Au minimum, la mort supposée de Burnham en 2258, l’omerta de Spock à son endroit, et l’absence de lien de sang avec Vulcain aurait dû la faire totalement tomber dans l’oubli.
Dans tous les cas, vouloir se servir d’elle et de sa notoriété auprès de la société de Ni’Var du 32ème siècle contredit ce que la série DIS avait établi dans sa saison précédente, et son identité même devrait être considérée par les Vulcains comme aussi suspecte que les prétendues "preuves" du point d’origine non vulcain du Burn.
En outre, Vance révèle-t-il un réflexe crypto-colonialiste en prenant les Vulcains pour des "sauvages", davantage impressionnables par la symbolique putassière d’un lien de famille "people" que par une démonstration logique ?

Sous le choc de découvrir l’accomplissement historique de son "frère" Spock, Mary-Sue ne pourra s’empêcher de convoquer fièrement par la pensée l’ultime enseignement qu’elle lui avait fièrement prodigué à la fin de DIS 02x14 Such Sweet Sorrow Part 2 : « Écoute-moi, petit frère. C’est le dernier conseil que je pourrai te donner. Il y a toute une galaxie là-bas, pleine de gens qui te tendront la main. Laisse-les faire. Tends-leur la main. ».
Somme toute, comme si cette réplique conclusive de la saison 2 de DIS n’avait pas déjà été assez dégradante pour la paternité et la vérité de l’amitié entre Spock et Kirk dans ST TOS (devant désormais son existence aux pieux conseils de Mary-Sue), voilà que le "révisionnisme" Burnham-centré s’étend désormais à la carrière diplomatique de Spock au 24ème siècle ! Ou comment, en semant de façon intempestive ses "germes d’empathie" dans toutes les alcôves relationnelles, Michael réussit à vampiriser tout ce qu’elle touche.

Puis Michael se précipite dans ses quartiers pour en apprendre davantage (alors qu’elle s’était jusque-là tenue loin des archives personnelles), et elle diffuse alors – en présence de Book – un extrait holographique des journaux de l’amiral Jean-Luc Picard faisant apparaître Spock interprété par Leonard Nimoy (en stardate 45825). Soit la concaténation de deux extraits de l’épisode ST TNG 05x08 Unification II. Un grand moment de nostalgie fan-service, et qui arracheront bien entendu des larmes à Burnham.
A cette l’occasion, Cleveland glissera une autre "lantern" : « You guys are chronic overachievers ». Pertinent bien sûr, mais sans effet aucun.
Accessoirement, d’une perspective internaliste, on pourrait se demander comment Starfleet disposait de l’enregistrement des propos de Spock tels qu’ils apparaissent dans ST TNG 05x08 Unification II... Pour l’expliquer, faut-il vraiment s’appuyer sur la série Picard et la transformation de son rôle-titre en "golem", impliquant que ses souvenirs personnels seraient devenus des bases de données ? Oh, les séries de Secret Hidehout peuvent toujours se faire mutuellement la courte échelle, mais elles n’y gagneront pas un iota de compatibilité pour autant avec le Star Trek pré-2009.

Un petit coup de propulsion mycologique, et l’USS Discovery se retrouve en orbite de Ni’Var, déjà prévenue par relai subspatial. L’hologramme de la présidente vulcaine, T’Rina, apparait sur la passerelle.
On se demande comment cette communication subspatiale a été soudain possible entre le QG de Fedefleet et Vulcain puisque la plupart sont HS depuis le Burn (expliquant le morcèlement structurel de l’UFP). D’autant plus que l’amiral Vance avait affirmé qu’il n’y avait plus le moindre échange avec Ni’Var depuis un siècle…
Une demande d’accès à SB-19 formulée en des termes diplomatiques (et diplomates) par Saru est immédiatement refusée par T’Rina au motif que celle-ci pourrait réveiller des tensions au sein de la société romulano-vulcaine.
C’est alors que, sans crier gare, Mary-Sue prend ce type d’initiative disruptive dont elle a le secret, à savoir invoquer le droit au T’Kal-in-ket, qui est un rituel philosophique d’investigation scientifique destiné à faire affleurer les vérités profondes, en usage depuis Surak, et ne pouvant être refusé à un(e) diplômé(e) de la Vulcan Science Academy (comme Burnham).
Surprise et contrariée, T’Rina n’a d’autre choix que de réunir un Quorum (ou Jury en VF)… constitué de trois ressortissants de Ni’Var (qui se matérialiseront rapidement à bord de l’USS Discovery) : V’Kir le leader d’une secte vulcaine puriste, Shina une représentante centriste de l’union romulano-vulcaine, et N’Raj un Romulien luttant pour davantage d’indépendance de ces semblables. La présidente elle-même assistera aux débats… qui prendront place dans le réfectoire de l’USS Discovery !
Le spectateur aurait certainement espéré descendre sur Vulcain, au minimum comme sur Terre dans DIS 03x03 People Of Earth, histoire de redécouvrir un monde étrange et de mesurer les évolutions sociétales depuis la somptueuse trilogie vulcaine de ST ENT. Mais rien de tel ici, nul amphithéâtre dans l’Académie des Sciences vulcaines, nul temple dédié à la raison, le seul horizon des débats sera celui du bottle show. Une possible limite budgétaire qui pourrait faire tache pour un épisode supposé aussi symbolique, quoiqu’il ne soit pas à exclure un choix intentionnel en prise avec les nombreux "épisodes procès" de la franchise – compensant alors très largement par leur qualité d’écriture l’exotisme (et/ou l’action) qu’ils ne pouvaient se payer (la véritable ambition n’étant pas forcément là où on le croit).
Malheureusement, comme le révélera la suite, DIS 03x07 Unification III est loin, très très loin de jouer dans la même cour, ni même dans le même univers qu’un ST TNG 02x09 The Measure Of A Man ou un ST DS9 04x18 Rules Of Engagement...

Une sœur de l’ordre du Qowat Milat est attendue, pour faire office de shalankhkai (en romulien) ou sha-set (en vulcain), i.e. "d’avocate" pour Burnham… quoique ce rôle se révélera bien vite être à l’inverse celui de garante de vérité et de détecteur de mensonge vivant. La "secte" du Qowat Milat est une invention de la série Picard, plus ou moins décalquée de sororités imaginaires célèbres tel l’ordre du Bene Gesserit dans l’univers de Frank Herbert, et dont le crédo est la "franchise absolue" ainsi que la "défense des causes perdues". Il n’est guère étonnant de retrouver ce construct typiquement kurtzmanien ici puisque la scénariste de l’épisode n’est autre que Kirsten Beyer, co-créatrice de Picard. Selon T’Rina, le Qowat Milat aurait joué un rôle déterminant dans la concrétisation de la réunification entre Vulcains et Romuliens, et désormais cette "secte" (sic) possède une exclusivité sur la fonction "d’avocat" (terme impropre quoique employé par l’épisode en VO) pour protéger la qualité des échanges.
La surprise est que la shalankhkai de Burnham s’avère être sa propre mère, Gabrielle ! Le syndrome de l’univers de poche bat donc son plein : en dépit des infinités temporelles et spatiales, ce sont immanquablement les seuls VIP qui se croisent et se recroisent sans cesse par le plus grand "hasard". Une rencontre larmoyante comme il se doit, mais qui fait l’économie de toute considération sur les voyages temporels et les timelines alternatives que pourtant mère et fille ont en partage. Il ne sera pas expliqué comment une terrienne de 23ème siècle échouée sur Essof IV (et non sur Terralysium) au 32ème siècle aura fait pour se retrouver engagée au sein du Qowat Milat en si peu de temps, cette "secte" étant en outre à l’origine réservée aux romuliennes ? Ni comment Gabrielle est passée d’une timeline prétendument dépourvue de toute vie sentient à celle-ci ? Fut-elle la mystérieuse deus ex machina de Kaminar (cf. DIS 02x06 The Sounds Of Thunder) ? Qu’est devenue la première combinaison du Red Angel en un temps où les voyages temporels sont interdits ? Rien, OSEF, c’est comme si la construction de la saison 2 n’avait été qu’un MacGuffin parmi d’autres, vite bouffée, vite ch... euh vite oubliée.
Très vite, les échanges entre mère et fille se déplacent sur le terrain soapy, car c’est bien ça qui importe avant tout dans chaque épisode, Mary-Sue n’hésitant pas à avouer qu’elle ne se sent pas vraiment à sa place sur l’USS Discovery, envisageant même de partir à l’aventure avec son amant Book.

Avant et après les joutes du T’Kal-in-ket, ainsi que durant la mi-temps, Saru contera fleurette à la séduisante présidente T’Rina. Il en profitera pour briller, faire le bel esprit, jouer au parfait diplomate plein de sagesse, jusqu’à lier un commencement de relation personnelle avec elle. Mais toujours imperturbablement satisfait de lui, ne se remettant jamais en question, Saru se garde bien de considérer les bénéfices qu’il est en train de tirer sans complexe de ce pour quoi il a sanctionné Burnham. Soit toute l’inconséquence de ceux qui chérissent les effets dont ils maudissent les causes (pour inverser la formule de Bossuet).
Ce sera l’occasion de quelques échanges "excentrés" sur la perspective de Ni’Var envers la Fédération, avec qui la relation s’était progressivement dégradée longtemps avant le Burn du fait de la politique expansionniste qui conduisait à l’épuisement des ressources de dilithium et à la surexploitation des rares planètes en possédant.
La transposition écologiste point sans ambages, et elle viendra probablement s’ajouter à toutes les autres ostensiblement contemporano-centrées que la série aligne tels des trophées...

Débute alors le T’Kal-in-ket au mess, encadré de flambeaux et d’un gong holographiques. La promesse était celle d’un procès à caractère scientifique, avec des débats argumentaires rationnels et logiques. Mais étant donné l’indigence factuelle des éléments apportés par Burnham (seulement trois boîtes noires), l’inquisition va rapidement changer de nature. Les fondements scientifiques de la requête de Burnham sont balayés d’un revers de main par le Vulcain V’Kir, rétorquant que celle-ci n’apporte rien que les Vulcains ignorent, tandis que la pauvreté de l’échantillon ne permet de tirer aucune conclusion. Une nouvelle "lantern" qui fait bien plaisir sur le coup, mais qui ne changera finalement rien tant elle restera décorative à terme.
Cependant, Burnham ne cessant de répéter qu’elle détient la "preuve" que les Vulcains ne sont pas à l’origine du Burn, et que seul l’accès au SB-19 permettrait d’approfondir les investigations dans l’intérêt commun de tous, elle finit par gagner le soutien du Romulien N’Raj (bien plus favorable à la Fédération que le Vulcain V’Kir) et le relatif intérêt de la Romulo-vulcaine Shina.
C’est dans le second round que la sœur Gabrielle abattra son jeu en atomisant le crédit de sa fille devant le Quorum, alors que celle-ci croyait encore naïvement que sa mère était-là pour défendre ses intérêts et sa cause. Dès lors, le T’Kal-in-ket se transforme en procès de Burnham et plus particulièrement de son complexe messianique, sa génitrice n’hésitant pas à utiliser contre elle les confidences qu’elle venait de lui faire en privé sous le sceau de la confiance, invoquant la curieuse obligation de confier tous ses états d’âme et ses pensées intimes à la cour. Et dès lors, tout y passe (ou presque) : orpheline, se croyant vulcaine alors que gouvernée par ses émotions, s’immisçant sans retenue dans les affaires importantes pour combler un vide émotionnel, indigne de confiance car désobéissant sans cesse aux ordres (ayant provoqué la mort de sa mentor la capitaine Philippa Georgiou à la Bataille des Etoiles binaires, récidivant envers Saru il y a 48 heures et ayant été démise de ses fonctions), aisément manipulable par la Fédération, tablant sur le favoritisme (à savoir que sa mère renierait son devoir de vérité imposé par le Qowat Milat...), etc.
Sidérée par les scuds successifs lancés par sa propre génitrice, quasiment en larmes, tétanisée et ne sachant plus quoi répondre, Michael semble brisée, ses prétentions mordent la poussière, et le T’Kal-in-ket est sur le point d’être refermé dans la honte et de déshonneur qui frappe quiconque l’aurait convoqué indûment.
Le premier mouvement du spectateur est évidemment d’être ravi… qu’ENFIN cette deus ex machina – ou plus exactement dea ex machina – de chaque épisode de la série, omnisciente et omnipotente, sachant tout mieux que personne, sainte, ange, archange, nombril du monde, ayant réussi à mettre en orbite tout l’univers autour d’elle… oui qu’ENFIN ce personnage paroxystiquement narcissique soit remis à sa place, publiquement qui plus est, et par un "avis autorisé", sa propre mère en robe de bure.
"Il était temps" et "les auteurs montrent ainsi qu’ils étaient aussi lucides sur leur créature que les spectateurs"... serions-nous tentés de penser de bonne foi. Burnham avait besoin de cette métanoïa pour avancer voire disparaître, et la série avec. Au minimum, il fallait cet électrochoc pour que l’héroïne sorte de son rôle si peu vraisemblable de Mary-Sue.

Oui… mais... non ! Car ce serait sans compter avec l’effet "lantern"… poussé ici à son apex.
Ainsi, aussitôt que les showrunners ont achevé leur sacrifice parfaitement cynique à la posture (pour un vernis de philosophie) et à la vox populi (pour accuser réception du bashing de la communauté) en questionnant le complexe messianique de Michael et en s’interrogeant sur sa place dans la série ("does she belong here ?")... Kurtzman & co enfoncent finalement le clou et remettent leur personnage en selle… de plus belle… et dans le même épisode s’il vous plait, juste cinq minutes après. L’illusion aura été de bien courte durée.
Car là où n’importe qui d’autre se serait effondré, demandant au jury de lui faire grâce… super-Burnham se relève et réussit à utiliser les procédés de son "détecteur de mensonge" de mère contre elle, l’obligeant "au nom de la vérité" à authentifier devant le Quorum tous ses exploits héroïques au nom de l’intérêt général. Et se faisant, elle réussira même, sans que Gabrielle ne s’en rende compte (ou plus exactement sans que les auteurs ne s’en rendent compte), à lui faire valider des assertions qu’elle ne pouvait personnellement garantir faute d’avoir été présente (e.g. le salut de tous les êtres sentients de l’univers) puis le contraire de qu’elle avait prétendu dans son réquisitoire initial (à savoir que l’UFP serait digne de confiance) au seul motif d’une différence de formulation ! In fine lorsque Burnham conclura sa contre-plaidoirie interactive en avouant ses doutes, sa peur de mal faire et de nuire à ceux qu’elle aime, sœur Gabrielle viendra affirmer de façon pontifiante, un tremolo dans la voix (en somme comme la père-la-justice Saru à la fin de DIS 03x06 Scavengers), que cette fois sa fille dit la vérité, enfin ! Alors qu’ironiquement, c’est exactement ce qu’elle avait dit d’elle-même au début du second round (lorsqu’elle réclamait l’aide du Quorum en admettant ne pas être sure d’elle).
Au bout du compte, cette séance de psychanalyse publique forcée (mais est-ce la psychanalyse de Michael ou finalement de Gabrielle ?) n’aura aucune utilité pour faire émerger une quelconque vérité sur le dossier du Brasier, se bornant à laver le linge familial en public pour un spectacle encore plus nombriliste qu’à l’accoutumée, et toujours déployé autour de la "souveraine" Michael Burnham. Mais, tout en se réclamant de la franchise absolue, la mère de Michael aura surtout réussi (malgré elle et en dépit des scénaristes) à faire une démonstration de manipulation émotionnelle au moyen de la rhétorique, car ce show exhibitionniste plein de rebondissements aura surtout mis davantage en condition le Quorum pour être affectivement réceptif aux saintes paroles de Mary-Sue.
Seul le pur Vulcain V’Kir restera encore plus ou moins immunisé envers cet enfumage, mais déjà N’Raj et Shina sont prêt à remettre à Mary-Sue, les clefs, non pas de Ni’Var, mais du SB-19. Elle remporte ainsi l’adhésion de la majorité, mais devant la résistance de V’Kir susceptible de briser l’entente toujours fragile entre Vulcains et Romuliens, et la multiplication des dissidences verbales dans la "salle d’audience", Michael a l’élégance de retirer sa requête pour respecter le combat de son "frère" Spock et pour que la réunification de Ni’Var ne compte pas au nombre des nombreuses victimes du Burn. Livrant ainsi une leçon de sagesse de haut de son humanité incontinente du 23ème siècle à ces garnements de Vulcains & Romuliens du 32ème siècle, mortifiés par la honte (V’Kir allant jusqu’à se perdre sur l’étonnante capacité de Spock a éprouver des émotions comme s’il avait oublié qu’il était à moitié humain), et suspendus aux paroles de la prophétesse.
La souveraine Mary-Sue quitte alors majestueusement la salle du conseil. La marque B a encore frappé, et il ne faut pas être grand clerc pour deviner que le dossier SB-19 ne mettra pas longtemps à arriver comme par magie entre les mains de l’héroïne – la pression imposée aux quelques réfractaires à l’Évangile selon Sainte Michael allant rapidement devenir intenable.
Ainsi donc, comme à la fin de l’épisode précédent (DIS 03x06 Scavengers), même lorsqu’elle perd, Mary-Sue gagne. Car telle est la seule loi qui régit le Burnham-show dans le Burnham-verse.

C’est d’ailleurs Gabrielle qui viendra dans les quartiers privés pour remettre triomphalement à sa fille l’enregistrement classifié SB-19 de la part de la présidente T’Rina, présentée cryptiquement depuis l’arrivée de Gabrielle sur l’USS Discovery comme "l’autre public" (hors Quorum mais néanmoins partie-prenante dans la décision finale). Il manque juste à la panoplie un bruyant "on a réussi à les avoir ces crétins" assorti d’un vulgaire "give me five" pour que cet épilogue suggère que le réquisitoire de la mère suivi de la remontada de la fille était une action parfaitement préméditée et coordonnée… ce qui aurait au moins eu le mérite de la crédibilité à défaut de la déontologie. Mais ce n’est pas même le cas, accusant dès lors l’irresponsabilité en lieu et place d’éthique, car ce T’Kal-in-ket allait mine de rien décider de l’avenir de Ni’Var et de la Fédération ! Mais Gabrielle a préféré confisquer un débat légitime au profit de ses règlements de comptes personnels (en somme à nouveau comme Saru dans DIS 03x06 Scavengers), quitte à briser la carrière de sa fille et impacter lourdement le futur (car absolument rien ne lui permettait de présager de la résilience de Mary-Sue), sans pour autant faire vraiment honneur à la vérité puisque sa fonction de shalankhkai n’en aura dévoilé aucune, du moins en relation avec la requête de Michael. Les seules vérités que Gabrielle a su exhiber sur la place publique, ce sont les traumas d’enfance de sa fille, ses incontinences émotionnelles (que tout le monde a largement eu le loisir de contempler ad nauseam), ses désobéissances répétées (mais en se gardant bien de les contextualiser alors que l’univers lui avait toujours donné raison), et ses doutes envers sa place au 32ème siècle… autant dire sans le moindre rapport avec l’objet même du T’Kal-in-ket (c’est-à-dire la recherche des causes réelles du Burn et la confiance ou non que mérite l’UFP). Pire, ces grands logiciens de Quorum n’ont même pas été fichus de relever les incohérences de validation du shalankhkai (soit contradictoires d’une réponse à l’autre, soit non certifiable par elle) par-delà le rideau de fumée rhétorique. Et puis, comment Gabrielle avait-elle accès avec une pareille omniscience à toutes les informations utilisées contre sa fille au procès, en particulier sa désobéissance 48 heures avant... alors que cette donnée n’était pas sortie des dossiers de Starfleet, que l’USS Discovery venait à peine d’arriver, et que Ni’Var n’est plus membre de l’UFP ? Accessoirement, quelqu’un songe-t-il que Gabrielle est issue de la même époque (première moitié du 23ème siècle) et de la même société (citoyenne de l’UFP) que Michael ?

Certes, comme tout s’est "bien" terminé, Gabrielle a maintenant beau jeu d’affirmer qu’elle n’avait rétrospectivement aucune autre intention que de prouver à sa fille qu’elle avait sa pleine place sur l’USS Discovery (révélant ainsi surtout l’intention réelle des auteurs). Ou encore se cacher derrière le crédo sophistique du Qowat Milat pour considérer que sa fille était une cause perdue lorsqu’elle l’avait flinguée, et qu’elle ne l’est plus depuis qu’elle lui fait des mamours.
Mais subordonner autant d’enjeux collectifs au seul intéressement personnel, au culte du "je", à l’hagiographie de Mary-Sue, et à l’irresponsabilité de coups de billards à trois bandes (qui épatent toujours le public)… cela en dit long sur les priorités d’écriture et l’éthique des showrunners.

En réalité, si V’Kir et ses semblables avaient vraiment voulu contester la crédibilité de Burnham, ils n’avaient pas besoin du Qowat Milat : en effet, c’est sa provenance du 23ème siècle qui récusait en essence sa représentativité envers l’UFP du 32ème siècle, de la même façon qu’un chevalier au service de Philippe le Bel ne serait qualifié à parler au nom de la Cinquième république.
De même, Burnham n’était pas davantage fondée à défendre les accomplissements de son "frère" au 24ème siècle ni parler en son nom, puisqu’elle provient d’un siècle antérieur où ni elle ni Spock ne savaient quoi que ce soit des Romuliens. En fait, Mary-Sue ne savait même rien des Romuliens une heure avant ce T’Kal-in-ket !
Mais si l’épisode était allé dans ce sens réaliste, ce sont les fondements même de cette troisième saison qui seraient devenus ouvertement contestables...
Il n’en demeure pas moins que toute la pseudo-"expertise" de Burnham sur une UFP qu’elle vient juste de découvrir, ses apologies enflammées de l’œuvre d’un Spock qu’elle n’a jamais connu, les sages conseils que viennent solliciter auprès de Michael le disciple de Spock, V’Kir, et la présidente vulcaine, T’Rina... c’est tellement ubuesque qu’il est difficile de ne pas s’en gausser... tout comme il est impossible de ne pas s’en indigner ! Car – derrière le miel des mots et les discours le cœur sur la main – cela a surtout pour effet désastreux de faire passer les deux Burnham (mère & fille) pour des manipulatrices tartuffes et plus particulièrement Mary-Sue pour une "accapareuse de paternité" cherchant à gouroufier tout le monde. En retour, cela transforme les Vulcains et les Romuliens du 32ème siècle en tribus primitives se laissant appâter par des "verroteries fétichistes" du genre : « il faut boire pieusement les paroles de Michael Burnham car c’est la sœur cachée, la muse, et la matière grise du mythique Spock qui lui doit d’être devenu le plus grand maître de Vulcain après Surak » !
Bref, lorsque l’imposture est avalée aussi benoîtement par l’espèce réputée la plus intelligente du Trekverse, ST Idiocracy confine ici à son paroxysme.

En amont, c’est la simple possibilité d’une telle confiscation autocentrée et strictement émotionnelle et intra-familiale d’un débat scientifique qui questionne la crédibilité même du T’Kal-in-ket, à fortiori au sein d’une société romulano-vulcaine.
L’intégralité du T’Kal-in-ket a consisté en un empilement d’attaques ad hominem, comme si celles-ci participaient d’une recherche de vérité scientifique. Les quelques dérives individuelles au sein de la société vulcaine parfois mises en scène dans la franchise (notamment au 22ème siècle de la série Enterprise) ne peuvent en aucun cas expliquer un pareil sophisme structurel ni l’aporie d’un rituel remontant à l’ère de Surak.
En outre, il y a une confusion de domaine et d’attribution puisque la vocation scientifique du débat est intégralement subordonnée et assujettie à des intérêts stratégiques (maintenir une illusion de stabilité dans une poudrière multiculturelle) et idéologiques (dépasser ou non ses préjugés envers la Fédération). Il ne reste donc rien de la logique vulcaine dans un pareil décalque des interférences typiquement humaines et contemporaines. À l’instar des Vulcains de Kelvin qui étaient devenus de simples-Terriens-comme-les-autres, le(s) peuple(s) de Ni’Var sont simplement l’humanité d’aujourd’hui (avec davantage de techno cela va de soi).
Le rôle du Qowat Milat sorti de Picard laisse aussi sérieusement à désirer, car s’il est évident que Secret Hideout cherche à réutiliser ses propres inventions (douteuses) d’une série à l’autre, les auteurs perdent de vue que la civilisation vulcaine – pratiquant le télépathique mind meld – n’a jamais eu besoin de sectes religieuses sorties de Dune pour déterminer la vérité d’un témoignage. Il y aurait d’ailleurs de quoi s’étonner que Ni’Var, cette si belle "réussite" Spockienne, soit désormais surtout constituée de "sectes", in texto dans le script de l’épisode. C’est tellement antithétique des cultures aussi bien vulcaine que romulienne…
Mais une fois de plus, les effets de manche l’emportent sur un worldbuilding tant soit peu cohérent, le Kurtzverse n’assurant que son propre SAV (et encore bien mal), en aucun cas celui du Trekverse.

Épisode après épisode, l’essentiel est que Mary-Sue apporte l’amour, la paix et le "Gospel de Michael" à chaque civilisation, mais surtout qu’elle ramène les "planètes égarées" dans le troupeau de la Sainte Fédération, plus rapidement encore que Dylan Hunt dans le Commonwealth de la série Andromeda.
Donc ici, "check" pour Vulcain + la nouvelle Romulus en un seul épisode. La "Reconquista burnhamienne" avance à pas de géant.
L’essentiel ensuite est que le jeu de piste galactique puisse reprendre, le nouveau MacGuffin jetable étant le SB-19, et ce afin que Super-Burnham du 23ème siècle résolve ce dont les natifs de l’Idiocracy du 32ème siècle furent incapables par eux-mêmes.
L’essentiel enfin est que Mary-Sue trouve sa place affective au sein de l’USS Discovery et accessoirement aux côtés de son prince consort, Book. Cette place, elle l’a donc trouvée dans cet épisode. Donc comme d’hab... puisqu’elle n’a jamais cessé de la trouver dans chaque épisode précédent, étant partout chez elle en tant que dea ex machina de son propre univers de synthèse.

La cerise sur la pièce montée revient sans conteste à la promotion par Saru de Sylvia Tilly à la fonction de XO, alias Number One. En somme, un passage direct d’enseigne (émotionnellement instable et totalement immature) à commandant en second, alors que l’USS Discovery est truffé d’officiers supérieurs bien plus expérimentés, bien plus compétents, et bien plus gradés qu’elle... allant jusqu’aux grades de lieutenant-commander et commander ! Et que dire de tous les officiers natifs du 32ème siècle (et dont regorge le QG de Fedefleet) qui auraient été bien plus fondés à occuper ce poste stratégique au sein d’un équipage confronté tout de même à des sociologies et les technologies ayant presque un millénaire d’avance ?!
Pour bien se représenter l’absurdité de cette décision de Saru, en la rapportant à des séries aussi trekkiennes que réalistes, c’est comme si Wesley Crusher avait été nommé commandant en second à la place de Riker dans ST TNG ou Nog à la place de Kira dans ST DS9.
Mais à cela, nul n’a même songé, tant dans l’équipage que dans la writer’s room. En revanche, pour réussir à faire avaler pareil morceau aux spectateurs, une salve peu commune de "lanterns" a été dégainée pour la circonstance :
- Tout d’abord l’objection opposée par Sylvia elle-même à Saru, lorsqu’elle lui demande « est-ce que vous m’offrez le poste parce que je suis qualifiée ou parce que je suis docile ? », ce qui à quoi le capitaine lui répond par un très passe-partout « je vous sollicite car c’est dans le meilleur intérêt du Discovery » ! Voici la quintessence même du procédé manipulatoire, où une question avisée est posée (l’alibi), mais celle-ci n’est suivie d’aucun effet crédible puisque la réponse tient de la diversion politicienne... et absolument rien ne fera ensuite obstacle au déroulement d’un script nonsensique. Saru apparaîtra encore moins digne de sa charge que dans les épisodes précédents, étant soit irresponsable, soit faux-cul, soit totalitaire (en se choisissant une XO au berceau pour lui être totalement soumise).
- Puis l’indécente tournée pleurnicheuse de Tilly auprès de tout l’équipage pour aller à la pêche aux avis – en vérité aux adoubements – en perspective de cette promotion-pour-rire. Comme dans les séances de groupe des pires téléréalités, Sylvia minaude, et son apparent manque de confiance en elle dissimule mal une vanité narcissique. Probablement le moment le plus puant de l’épisode.
- Ensuite la réaction initialement outrée de Stamets à la perspective d’obéir à cette gamine moins gradée que lui. Mais nul n’est dupe, il s’agit de préserver les apparences de la crédibilité avant de la fouler aux pieds.
- Enfin, la "say yes party" de tout l’équipage (Stamets compris et Burnham en différé) pour propulser en orbite la prétendue fan favorite de l’équipage. Ce faux second degré constitue le moment le plus embarrassant de toute la série. Est-ce à dire que les promotions à bord de l’USS Discovery se décident désormais par plébiscite à la manière d’un concours de popularité, d’une élection de délégué de classe… ou d’une succession à bord d’un vaisseau pirate ? Des références pour le moins éloquentes...
Cette injure à la crédibilité trekkienne, cette insulte aux valeurs militaires (y compris du monde contemporain), ce bras d’honneur à tous les officiers consciencieux que l’égotisme n’aura pas conduit à se mettre en scène et à se contempler le nombril en toute occasion, ce crachat envers l’idéal méritocratique de Star Trek... convoquent pêle-mêle les notions infamantes de piston, de copinage, de népotisme, de démagogie, de dinette. C’est littéralement la "culture Instagram" qui s’invite par le portillon du fan-service le plus infantile (cherchant à flatter les midinettes et les ados), où les promotions ne résultent plus du travail ni du mérite, mais de la popularité et de la séduction.
Tilly "se la joue" avec incontinence dans presque chaque épisode, elle occupe le devant de la scène pour quasiment rien (hormis le plaisir de se montrer), elle est donc l’équivalent contemporain de la vedette autoproclamée de téléréalité… Quoi de plus naturel alors qu’elle reçoive des propositions… dans le monde vedettisé d’aujourd’hui… mais pas dans le Starfleet de Star Trek. Sauf qu’il n’y a de facto plus la moindre différence, le Kurtzverse ayant depuis longtemps mis le cap sur la société contemporaine dans ce qu’elle pouvait avoir de plus triviale, de plus quelconque, et de plus moche.
Et s’il est toujours légitime de s’en indigner, il ne faut en revanche pas s’en étonner, puisque le pli avait déjà été pris par la promotion-éclair de Baby-Kirk, pas seulement en fonction mais également en grade, directement de cadet (pas même encore enseigne) à capitaine de vaisseau... dans le ST 2009 du même auteur que DIS. Le patte ubuesque de l’auteur commun se remarque tout de suite.
Mais puisque c’est le monde des Teletubbies, il est juste dommage que ce ne soit pas le chat Grudge qui ait été nommé commandant en second. L’audace inclusive aurait été alors beaucoup plus grande.
Peut-être serait-ce une façon de donner du sens à la forme : plus Sylvia prend du poids, plus elle est pèse sur la série ! Ainsi s’écrirait la nouvelle grammaire de la "cohérence" kurtzmanienne...

On savourera enfin que DIS 03x07 Unification III offre un chœur antique aux concerts de pleurs (et de chuchotements) dont Burnham est généralement la soliste. Donc outre Mary-Sue qui larmoie bien sûr dans presque chaque scène... cette fois, Sylvia Tilly chiale aussi (mais quant à elle sur sa seule personne, sa popularité et sa "carrière" Instagram). Ainsi que Gabrielle Burnham qui s’émerveille en larmes que sa fille survive à toutes les chausse-trappes qu’elle lui a si affectueusement tendues.
Que penser d’un cadre professionnel, a fortiori d’une structure militaire, où chacun exhibe sans complexe et en toute occasion ses larmes devant ses collègues et ses supérieurs hiérarchiques, épisode après épisode, scène après scène ? Comme si pleurnicher était devenu un mode de communication, de manipulation, de sujétion ! Un pareil "Starfleet-des-pleurs" est plus-que-risible, telle une mauvaise émulation d’un monde d’adulte par des ados voire par des mioches.
Et cet honneur lacrymal revient toujours exclusivement au beau sexe dans l’univers de Discovery, soit la pérennisation militante d’un cliché phallocratique sur les incontinences émotionnelles genrées... qui jure tout de même "un peu beaucoup" pour une série prétendument si woke à s’ériger en fer de lance des luttes intersectionnelles et à cocher toutes les cases du progressisme politiquement correct.

Et pour seule conclusion de cet épisode si symbolique... une signature The CW ! L’amant musclé enlace la belle héroïne dans ses bras, et tous deux contemplent ensemble l’avenir et l’espace (à travers deux vaisseaux gigognes) en s’échangeant des guimauves existentielles : "j’appartiens au Discovery", "tu es mon tabernacle", etc. Profond, dans tous les sens du terme.
Le message est donc clair : que ce soit Spock devenu un grand homme devant l’Histoire, une réunification Vulcains-Romuliens pluri-centenaire, la maïeutique du T’Kal-in-ket, le plébiscite égocentré de Tilly… tout et le contraire de tout n’avaient finalement qu’un but, qu’une fonction, qu’une seule raison d’être : servir Michael Burnham, son épanouissement, son bonheur, sa gloire, son règne, son nombril, son omniscience, son omnipotence, son hagiographie, son messianisme, la religion autour de sa personne, et son micro-univers sur mesure.
Louée soit la divine Mary-Sue.

Conclusion

DIS 03x07 Unification III emblématise comme jamais la ligne de fracture entre deux façons d’appréhender les productions Kurtzman.

À sa façon, cet épisode fait un inhabituel effort d’émulation trekkienne, tant par sa forme que par son écriture :
- huit clos intentionnel à faible budget comme ceux dans lesquels le ST excellait ;
- procès argumentaires permettant d’exposer plusieurs visions alternatives et explorer des dilemmes moraux ;
- dialogues nombreux privilégiant l’introspection et le recueillement aux SFX et à l’action ;
- retrouvailles par-delà le temps et l’espace de l’héroïne principale avec sa mère déclarée perdue ;
- sentiment d’appartenance et de complicité au sein du main cast à tel point que les fonctions et les grades deviennent secondaires par rapport à la camaraderie et à l’amitié ;
- retour aux sources d’un diptyque mythique de TNG pour faire aboutir sur la durée l’ultime "grand œuvre" de Spock ;
- autocritiques des auteurs, notamment envers son personnage vedette qui prend cher avant de se trouver une place (en apparence) plus modeste dans la série ;
- worldbuilding faisant significativement évoluer sur le long terme deux des civilisations les plus fantasmatiques du Trekverse ;
- jonctions internalistes entre ST TNG, Kelvin, Picard, et désormais la saison 3 de Disco.
Unification III offre donc le "maximum" de ce que Discovery pourra jamais offrir en terme de "fond" (donc SFX et action exceptés).
Et à un niveau de lecture purement entertainment, c’est-à-dire mélo, superficiel, illusoire, "cerveau au vestiaire", kikoolol, ou auto-suggestif... il pourrait mériter un 5/5 dans son propre "genre" et dans toute sa "splendeur".
Rien d’étonnant que certains fans de DIS (si, si, il y en a !) y voient le meilleur épisode à ce jour.

Malheureusement, à un niveau de lecture exigeant, viscéral et holistique, priorisant le sens, la raison et la cohérence, à la lumière de l’ensemble des relations de causes à effets à l’échelle de la série DIS et des productions Kurtzman depuis 2009, mais aussi et surtout du Star Trek Universe historique... rien n’est ici ce qui semble être et rien ne tient vraiment la route. En fait, tout, absolument tout est factice et bidon, comme pourraient l’être des châteaux holographiques en Espagne :
- le huis clos résulte probablement d’une coupe budgétaire, car il est narrativement articulé comme un bottle show malgré lui ;
- le pseudo-procès au cœur de l’épisode est totalement détourné de sa vocation discursive et intellectuelle pour verser dans une séquence putassière interpersonnelle façon The Larry Sanders Show, confondant l’honnêteté intellectuelle avec l’incontinence émotionnelle, et la psychanalyse avec le déballage des traumas ;
- les nombreux dialogues ne portent sur aucun autre sujet que sur l’exhibitionnisme et le culte du "soi", généralement enrobés d’un matelas chouineur de pathos ;
- une rencontre entre la mère et la fille sur un timeframe de 930 ans au carrefour de plusieurs timelines et l’envergure d’une galaxie est encore plus improbable que la rencontre de Baby-Kirk et de Spock-Nimoy sur la Delta Vega vulcaine de ST 2009 ;
- le sentiment d’appartenance et de camaraderie n’est qu’une parade ouatée "feel good" pour couvrir les camouflets promotionnels, les puérilités décisionnelles, et un glissement des idéaux méritocratiques trekkiens vers l’égotisme des réseaux sociaux contemporains ;
- la volonté de faire aboutir "l’ultime combat" de Spock est ruinée dans sa vocation même par le génocide de Romulus organisé par Kelvin et entériné par la Fédération indigne de la série Picard ; il n’en reste que des miettes pour le name-dropping et le fan-service ;
- les autocritiques des auteurs ne sont que des alibis – ou "lanterns" – placés massivement dans les dialogues pour faire accroire à leur légitimité et se dédouaner des critiques usuelles exprimées par les "foules révoltées"... mais sans jamais remédier aux causes (ni aux conséquences) ; autant dire une (autre) forme (de tentative) d’escroquerie décomplexée... mais qui finalement se retourne contre les showrunners à la façon d’un aveu d’impuissance et d’une confession de médiocrité ;
- le worldbuilding se borne surtout à un changement de nom (Vulcain devenant Ni’Var, mais après tout la Terre elle-même possède aussi d’innombrables noms différents selon les langues) et à un utilitarisme transpositionnel contemporano-centrée de plus ;
- les tentatives de jonctions internalistes soulignent toute leur artificialité étant donné la masse critique d’incohérences, de contradictions, de WTF, et de simplismes qui les accompagnent à chaque fois.
S’il exploite sans complexe et sans respect le ST roddenberro-bermanien, le ST kurtzmanien roule surtout pour lui-même et assure avant tout sa propre promo. Mais il y a eu tellement d’incohérences et d’incompatibilités cumulées dans les séries de Secret Hidehout depuis 2017 envers le ST pré-2009 que ces dernières ne peuvent plus constituer des gages de crédibilisations mutuelles ni s’invoquer l’une l’autre à l’échelle de l’Histoire du futur.
Au bout du compte, la saison 3 de DIS est bien moins la sequelle d’ENT-TOS-TNG-DS9-VOY qu’elle n’est la sequelle de la série Picard – appartenant à une tierce timeline commune aux deux premières saisons de DIS et ayant pondu le "fork" Kelvin à partir de 2387.

Discovery 03x07 Unification III prétend s’ériger en suite du diptyque homonyme de la cinquième saison de ST TNG. Las, l’épisode ne dépasse pas le stade de la prétention, et de ce fait, c’est bien tout en prétention qu’il est. Une ambition démesurée qui accouche d’une indigence abyssale.
Le cœur de l’épisode dévoile une succession de manipulations cyniques, de révisionnismes éhontés, et d’OPA hostiles sur l’in-universe préexistant...
"L’ordalie" que Gabrielle inflige à Michael est vaguement inspirée du monomythe campbellien qui pollue presque toute la fantasy (mais qui n’a pas philosophiquement et métaphysiquement sa place en SF), et qui correspond peu ou prou ici à l’épreuve de la révélation au héros (aux mille visages) de ses doutes et de ses failles. Discovery prend ainsi prétexte d’un débat qui décidera de l’avenir de l’UFP et de Vulcain/Ni’Var pour organiser la catharsis publique d’une relation mère/fille tout en tentant de la justifier sur une base tactique. Jamais un épisode n’aura poussé si loin les mécanismes du soap, colonisant officiellement les affaires d’état. Et derrière des "amendements" de tartuffes, les performances d’écritures – assurément moins médiocres que d’habitude – ne pourront pas être versées au crédit de l’épisode puisqu’elles sont indignement détournées et dédiées à une glorification, non plus circonstancielle, mais désormais structurelle de Mary-Sue-Burnham. Idem hélas pour la prestation pourtant en soi réussie de Tara Rosling dans le rôle de la présidente T’Rina, tout en finesse et retenue (façon T’Pol dans ST ENT).
La réunification elle-même, depuis son origine (Spock influencé par Burnham) jusqu’à sa préservation aujourd’hui (Michael qui fait mine de se rétracter) n’existe in fine que pour servir de support et de culte à la dea ex machina à travers les siècles des siècles. Depuis le lointain passé (2358) où elle ne savait pas qui étaient les Romuliens au lointain futur (3188) où elle vient juste de le découvrir, Ni’Var doit pourtant indirectement tout à Mary-Sue ! Elle est en quelque sorte Brahman qui ne connait point sa création.

La tragique équation kurtzmanienne se vérifie donc à nouveau : « comme il est toujours possible de tomber plus bas, la suite sera forcément pire » !
Chaque connexion à l’héritage, chaque placement internaliste, chaque velléité de worldbuilding, chaque abonnissement comportemental... dissimule en réalité un phagocytage prédateur du Star Trek historique et le marchepied d’un agenda politique...
Pour la première fois peut-être, Discovery fait l’effet d’être un parasite, un coucou, un changeling qui réécrit la mémoire des personnages historiques à son profit comme dans l’épisode Rick And Morty 02x04 Total Rickall. Le One Burnham Show serait ainsi une "série mytho" où Mary-Sue s’imagine avoir joué un rôle déterminant dans le destin glorieux de Spock (et de Vulcain).... alors qu’elle n’existait pas il y a seulement quatre ans et que Star Trek se portait incomparablement mieux sans elle. La larmoyante & "chuchotante" archange Michael est peut-être Tout dans le Kurtzverse, mais elle n’est strictement rien dans le Trekverse.

Ce noyautage paré de prosopopée devient encore plus éclairant avec quelques clefs de décryptage "méta" supplémentaires... dès lors que l’on comprend que l’Élue Michael Burnham est la projection d’Alex Kurtzman himself tandis que la pistonnée Sylvia Tilly n’est autre que l’avatar de Gretchen J Berg et/ou de Michelle Paradise.

0/5

ou

YR

EPISODE

- Episode : 3.07
- Titres : Unification III
- Date de première diffusion : 26/11/2020 (CBS All Access) - 27/11/2020 (Netflix)
- Réalisateur : Jon Dudkowski
- Scénariste : Kirsten Beyer

BANDE ANNONCE





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